On lit dans la vie du Père François Libermann, fils de rabbin et notre second fondateur, que l’amour de Marie lui fut donné par Dieu, lors de son baptême, à l’âge de 24 ans. Et lui fut donné comme un cadeau de choix qui illuminera toute sa vie. « Quand l’eau du baptême coula sur ma tête de Juif, à l’instant j’ai aimé Marie, que je détestais auparavant. » C’était le 24 décembre 1826.
Autre fait significatif, 14 ans plus tard, alors qu’il peinait à mettre au point la Règle provisoire, dans sa mansarde romaine : « tout est devenu clair pour lui à partir du moment où il décide de consacrer son œuvre au très saint cœur de Marie. Dès l’origine, son impulsion de fondateur, comme il dit, a été liée à une confiance exceptionnelle en Marie, avec une référence particulière à son très saint cœur, » auquel il se confiait pour le présent et pour l’avenir. D’où la présence devant lui de son image, rappelle-t-on.
Chez Libermann, par rapport à la Vierge Marie, ce qui frappe, c’est que sobriété et intensité de l’expérience mariale allaient de pair. Il a surtout été attiré par sa sainteté et la richesse de sa vie intérieure. « Il n’hésite pas à la donner comme modèle à ses missionnaires, à cause de cette vie d’oblation, qui caractérise son cœur de mère. De même Libermann croit beaucoup à la tendresse du cœur de Marie. C’est pourquoi il en fait son refuge. »
Marie, modèle et refuge. C’est ainsi qu’on peut lire dans la « deuxième règle » (1849) : « Les missionnaires considéreront l’Immaculé Cœur de Marie comme un modèle parfait de fidélité à toutes les inspirations du Divin Esprit et de la pratique intérieure des vertus de la vie religieuse et apostolique. Ils y trouveront un refuge auquel ils auront recours dans leurs travaux et leurs peines, et y épancheront leur cœur, avec une confiance d’enfant, dans leurs faiblesses et leurs tentations. »
L’exemple de Marie. « Pas de vie apostolique sans intimité avec le Christ. Par l’Esprit-Saint, Marie est unie, de manière unique, à la vie et à la mission de son fils. « Oui, qu’il me soit fait selon ta parole. » Marie consent à l’Esprit-Saint, elle ne résiste pas…par son « oui » à l’annonciation et devant la croix, elle est un modèle pour les apôtres. »
Autre aspect de l’apostolat vécu par Marie, celui que le Père Libermann rappelle à un missionnaire retenu en Europe pour raisons de santé : « Marie n’est pas allée prêcher l’Evangile de son Fils, mais elle a souffert dans son cœur, voilà l’unique apostolat de Marie ». Quand les difficultés (maladies, oppositions, même notre péché), font échec à notre désir de servir, puisse le Seigneur Jésus nous apprendre, à nous aussi, par Marie à dire : « Oui, que ta volonté soit faite et non la mienne. »
Quand Libermann consacre l’œuvre naissante au saint Cœur de Marie, Marie qui consent à l’Esprit Saint, il ne pense pas uniquement ni d’abord à la piété mariale, mais bien à la vie apostolique. Pour lui, le principal obstacle à l’œuvre que Dieu confie, c’est le missionnaire qui résiste à l’Esprit Saint. D’autre part, dans l’esprit des premiers missionnaires - ils ont retenu la leçon – « l’entreprise audacieuse qui est la leur ne peut être accomplie qu’avec cette assurance de la présence affective et effective de Marie, conduisant et soutenant les envoyés de Dieu pour que Jésus soit connu et aimé de tous les peuples. Nous sommes loin d’une simple dévotion. Il s’agit d’une authentique inspiration.. »
Quelques conseils enfin sur la récitation du chapelet, donnés à un confident, que l’on peut considérer comme la manière propre de faire du P. Libermann : « Pour le chapelet, ne cherchez pas absolument à entrer dans tous les sentiments et toutes les pensées de la prière que vous récitez ; tenez-vous paisiblement uni à Dieu ou à la très Sainte Vierge par le fond de votre intérieur ; vous pouvez aussi vous unir de cette manière aux intentions et aux désirs de la très sainte Vierge. Pourvu que vous soyez bien uni à Dieu, c’est tout ce qu’il faut. Si vous avez des distractions et des misères, cela ne fait rien.. »
Voilà le message que le Père François-Marie Paul Libermann a laissé à ses fils. Ses fils dont Mgr Truffet (+ 1847) qui appelait Marie « la vraie missionnaire des Noirs » ; Mgr Kobès (+ 1872), le fondateur de la congrégation des Filles du Saint Cœur de Marie ; Mgr Picarda (+ 1889) qui, lui, fait choix du site de Poponguine comme lieu de pèlerinage en l’honneur de Notre-Dame de la Délivrance ; Mgr Jalabert (+1920) et son idée d’une cathédrale – à Dakar – dédiée à Notre-Dame des Victoires…
Sources : Paul Coulon.. « Libermann » Paris 1988
A.Gilbert. « Le feu sur la terre » 1985
- Aubert « Prier 15 jours avec François Libermann. » 2003