LA CONVERSION DE SAINTE MARIE L’EGYPTIENNE
Le plus fameux témoin de la confiance populaire dans l’intervention de Marie est le récit de la conversion de sainte Marie l’Egyptienne. On ne sait ni la date ni l’auteur de la légende de cette pécheresse convertie, qui mourut vers 431, sinon que cette légende est antérieure au VIII° siècle.
Marie l’Egyptienne menait ‘depuis dix-sept ans la vie de prostituée, lors qu’elle fit le voyage de Jérusalem dans des intentions coupables. Le jour de l’Exaltation de la Sainte Croix, elle tenta d’entrer dans la basilique, mais une puissance invisible l’en empêcha plusieurs fois. Dans son trouble, elle aperçut une image de la Sainte Vierge qui se trouvait là et fut fortement inspirée de recourir à elle.
Vierge maîtresse, vous qui avez enfanté le Dieu Verbe selon la chair, je sais, oui, je sais qu’il n’est pas convenable ni raisonnable qu’une femme aussi impure, aussi souillée, contemple votre image, vous la toujours Vierge, vous la Pure; vous qui avez le corps et l’âme purs et sans souillure. Il est juste que moi, la souillée, je sois haïe de votre pureté et rejetée. Cependant, à ce que j’ai appris, le Dieu que vous avez enfanté est devenu homme pour appeler les pécheurs à la pénitence. Secourez-moi puisque je suis seule et que je n’ai personne pour me venir en aide. Ordonnez qu’à moi aussi soit permise l’entrée de l’église. Ne me privez pas de voir le bois sur lequel a été cloué selon la chair le Dieu que vous avez enfanté, sur lequel il a donné son propre sang en rançon pour moi. Ordonnez, ô Maîtresse, qu’à moi aussi soit ouverte la porte de l’adoration divine de la Croix. Je vous donne vous-même comme garantie solvable au Dieu que vous avez enfanté. Je ne prostituerai plus ma chair par les honteuses unions de jadis. Mais dès que j’aurai vu le bois de la croix de votre Fils, je renoncerai aussitôt au monde et à tout ce qui est dans le monde et j’irai immédiatement là où vous m’amènerez et me conduirez, la garante de mon salut.
C’est la repentie elle-même qui est censée rapporter l’épisode. Elle poursuit son récit: Ayant ainsi parlé et mettant en quelque sorte ma confiance dans le feu de la foi, encouragée par la bénignité de la Mère de Dieu, je quitte la place où je m’étais tenue pour faire ma prière; je reviens et je me mêle à ceux qui en traient. Personne ne m’arrête, personne ne me repousse, personne ne m’empêche d’approcher de la porte par la quelle on pénètre dans le temple. L’effroi et l’égarement me saisissent; je frémissais et je tremblais toute. J’atteins enfin la porte qui m’avait été jusqu’alors fermée, comme si la puissance qui m’avait retenue s’était tout à coup relâchée. Une fois admise dans le saint lieu, je contemple la croix vivifiante; je vois les mystères de Dieu et comment il est prêt à recevoir les pénitents. Puis, je me hâte de sortir et de retourner aux pieds de ma répondante.
Là, fléchissant le genou devant la Mère de Dieu toujours Vierge, je lui adresse cette prière « Bonne maîtresse, tu as montré ton humanité, tu n’as pas méprisé la prière de l’indigne, j’ai vu la gloire dont nous autres, les impurs, sommes justement privés: gloire à Dieu qui par toi a reçu la pénitence des pécheurs. Qu’aurai-je de plus à penser ou à dire, pécheresse que je suis? II est temps, Maîtresse, que soient accomplies les promesses de la garantie que tu as acceptée. Conduis-moi donc maintenant où tu le voudras; deviens pour moi le gage du salut, en me guidant par la main dans la voie qui mène à la pénitence. »
SEDULIUS
L’Eglise a adopté ce petit texte de Sédulius pour en faire l’introït et le verset « alléluiatique » de la messe votive de la Sainte Vierge, contrairement à l’usage antique qui emprunte toujours à l’Ecriture Sainte le texte des introïts.
Salut, ô sainte Mère, toi qui as enfanté le Roi qui tient, à travers les siècles, le ciel et la terre dans sa main; le Roi dont la divinité, dont l’empire, qui embrasse tout dans son cercle éternel, n’auront pas de fin. C’est toi dont les entrailles bienheureuses t’ont donné les joies d’une mère et l’honneur des vierges. Avant toi aucune femme semblable n’est apparue; il n’y en aura plus après toi; tu es la seule et uni que femme qui ait plu au Christ.